L’Europe avait un rêve : produire une grande partie des batteries de ses voitures électriques sur le continent. Un objectif ambitieux et ô combien nécessaire, qui permettrait de réduire la dépendance vis-à-vis des groupes asiatiques. Mais les doutes des constructeurs locaux face à la voiture électrique, leur détermination à maintenir des prix exagérément élevés et leur lutte pour réduire les normes d’émission par des campagnes de dénigrement constantes, sont sur le point de provoquer une hécatombe dans la jeune industrie européenne des batteries.
Il y a quelques jours, nous avons appris que Automotive Cells Company (ACC), une coentreprise entre Stellantis, Mercedes et TotalEnergies, qui prévoyait de construire trois gigafactéries de batteries en Europe dans les années à venir, a décidé de freiner le projet.
Plus précisément, c’est en juin qu’ACC a annoncé l’arrêt des travaux à l’usine de Termoli en Italie et à celle de Kaiserlauten en Allemagne. L’usine française, située dans l’aglomération de Calais, devait compter jusqu’à quatre bâtiments, mais n’en construira finalement qu’un seul, qui assurera 50 % de la production estimée.
Un autre projet était mené par l’entreprise taïwanaise ProLogium, qui construisait une usine géante dans la ville française de Dunkerque. Une initiative qui, comme les précédentes, a été largement soutenue par des fonds publics. L’usine n’a pas encore démarré sa production et les objectifs ont été revus à la baisse, passant de 48 GWh à entre 8 et 16 GWh d’ici 2030.
Mais le véritable désastre pour l’Europe plane sur l’initiative de Northvolt. Géant des batteries et tête de pont de l’Europe, il est aujourd’hui au bord de la faillite. Ce projet a englouti plus de 15 milliards d’euros d’ argent public et d’investisseurs comme Volkswagen. Le 18 septembre, Northvolt a reçu le refus du gouvernement suédois de la sauver, laissant son avenir plus incertain que jamais.
Un problème de vision, de technologie et de demande
Le problème n’est pas unique. Ces initiatives doivent faire face à une industrie extrêmement compétitive. Les initiatives telles que celles d’ACC sont accusées d’être dépassées. Ni les performances ni les prix n’atteignent le niveau des groupes leaders, ce qui constitue un sérieux handicap pour leur compétitivité.
L’autre problème est précisément que les constructeurs européens n’ont pas pu, ou pas voulu, encourager les ventes de voitures électriques. Ils ne se sont pas non plus engagés dans les réseaux publics de recharge, ce qui a entraîné un climat très pessimiste chez les consommateurs, qui se sont temporairement retirés du marché.
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Un exemple est l’effondrement complet du marché allemand, avec près de 70 % de ventes en moins en août, et qui est dans le rouge depuis décembre. Un effet qui s’étend à la France, avec une chute de plus de 30 % en août. Au total, les ventes de voitures électriques en Europe ont chuté de 36 % en août, marquant un creux de deux ans en termes de parts de marché.
La question de la confiance joue un rôle clé sur ce marché. Nous l’avons vu avec l’annonce faite par l’Allemagne en décembre dernier de mettre fin aux subventions publiques, ce qui, malgré les fortes promotions des constructeurs qui ont égalé ou dépassé ces subventions, n’a pas aidé à redresser les ventes.
Une stratégie que poursuivent aujourd’hui plusieurs groupes, comme Volvo, en indiquant qu’ils ne poursuivront pas leur objectif d’être 100% électrique d’ici 2030, et qu’ils reviendront aux hybrides. Un signe de plus à contre-courant d’un marché qui s’oriente inexorablement vers l’électrification, qui se fera avec ou sans les groupes européens.